30/05/2019

FRANCE: Ordonnance du 24 avril 2019 : ce qui change en matière de « transparence dans la relation commerciale »



L’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019 (JO du 25 avril), refond entièrement le Titre IV du Livre IV du Code de commerce relatif à la transparence, aux pratiques restrictives de concurrence et aux autres pratiques prohibées.

Nous traitons ici du Chapitre 1 relatif à la transparence dans les relations commerciales, à savoir, les CGV, la convention unique, les factures et délais de paiement. Ce chapitre 1 est divisé en plusieurs sections et sous sections.


LES CONDITIONS GÉNÉRALES DE VENTE (Section 1)
L’ordonnance crée un nouvel article L.441-1 du Code de commerce organisé en quatre parties distinctes :
1.     Le contenu des CGV, comprenant les conditions de règlement ainsi que les éléments de détermination du prix, et notamment le barème des prix unitaires et les éventuelles réductions de prix. Lorsque le prix d’un service ne peut être déterminé a priori, le prestataire de services est tenu de communiquer la méthode de calcul du prix ou un devis ;
2.     L’obligation de communication des CGV (sur un support durable) à tout acheteur qui en fait la demande. Les conditions générales de vente peuvent être différenciées selon les catégories d’acheteurs de produits ou de prestations de services ;
3.     Le rôle des CGV, qui comme par le passé, doivent constituer « le socle unique de la négociation commerciale » ;
4.     La sanction du défaut de communication des CGV par une amende administrative (et non plus civile) ne pouvant excéder 15 000€ pour une personne physique et 75 000€ pour une personne morale, prononcée par la DGCCRF.

LA NÉGOCIATION ET LA FORMALISATION DE LA RELATION COMMERCIALE (Section 2)
Conventions écrites (Sous-section 1)

La nouvelle ordonnance réorganise et modifie les dispositions relatives à la convention unique avec les nouveaux articles L.441-3 et suivants du Code de commerce.

L’article L.441-3 fixe les règles générales s’appliquant (hors produits agricoles et denrées alimentaires) à tout distributeur, qu’il soit grossiste ou détaillant :
·         Pour l’essentiel les principes restent inchangés, notamment concernant la durée de tels contrats ou le fait qu’ils doivent être conclus soit avant le 1er mars, soit dans les 2 mois d’un cycle de commercialisation. En revanche, les CGV n’ont à être communiquées que dans un délai raisonnable avant ces dates.
·         Les avenants au contrat devront être faits par écrit, ce qui doit permettre de s’assurer que ces derniers ne remettent pas en cause l’économie générale du contrat.
·         En ce qui concerne les prix : (i) la convention peut dorénavant prévoir les modalités selon lesquelles des conditions dérogatoires de l’opération de vente sont applicables, (ii) les services de « coopération commerciale » entrent également dans la détermination du prix et (iii) il n’est plus fait mention de la date d’effet des prix comme c’était le cas dans la relation avec les détaillants.
·         Lorsqu’elle est conclue pour une durée de deux ou trois ans, la convention fixe les modalités selon lesquelles le prix convenu est révisé. Ces modalités peuvent prévoir la prise en compte d’un ou de plusieurs indicateurs disponibles reflétant l’évolution du prix des facteurs de production.

Des dispositions supplémentaires figurant au nouvel article L.441-4 s’appliquent aux relations avec les détaillants lorsque la convention porte sur des « produits non durables à forte fréquence et récurrence de consommation » (dont la liste sera fixée par décret) :

·         Le Code définit le terme de grossiste, auquel ce régime ne s’applique pas.
·         Le barème de prix n’a pas besoin d’être joint à la convention, si celle-ci précise les modalités de consultation du barème ayant servi de base à la négociation.
·         Les conventions devront fixer le chiffre d’affaires prévisionnel annuel et, le cas échéant, ses modalités de révision. Il constitue, avec l’ensemble des autres obligations fixées par la convention, le « plan d’affaires ».
·         La date d’entrée en vigueur de chacune des obligations prévue pour les différents services du distributeur est « concomitante à la date d’effet du prix convenu », ce dernier s’appliquant au plus tard le 1er Les dispositions relatives aux conditions dérogatoires de l’opération de vente (visées ci-dessus) ne sont pas applicables.
·         Le fournisseur communique ses CGV au distributeur au plus tard trois mois avant le 1er mars ou deux mois avant le point de départ de la période de commercialisation. Le distributeur dispose d’un délai raisonnable à compter de leur réception pour notifier par écrit les motifs de refus de ces dernières ou, le cas échéant, les points qu’il souhaite négocier.
·         La règle sur les mandats relatifs aux avantages accordés aux consommateurs ou nouveaux instruments promotionnels (NIP) s’applique dans ce cadre. Comme par le passé, une limitation dans leur montant s’applique à certains produits agricoles.

Les conventions entre fournisseur et distributeur portant sur des produits alimentaires sous marque blanche (ou marque distributeur) doivent, selon le nouvel article L.441-7, mentionner le prix ou les critères et modalités de détermination du prix d’achat des produits agricoles entrant dans la composition de ces produits alimentaires.
Pour rappel, le Code de commerce impose aussi des obligations relatives aux conventions pour la conception et la production de produits manufacturés fabriqués à la demande de l’acheteur en vue d’être intégrés dans sa propre production, qui figurent dorénavant à l’article L.441-5.
La sanction du non-respect des dispositions sur les conventions (à l’exception de celles portant sur des produits alimentaires sous marque blanche) est une amende administrative (et non plus civile) ne pouvant excéder 75 000 € pour une personne physique et 375 000 € pour une personne morale, prononcée par la DGCCRF. Le maximum de l’amende encourue est porté à 150 000 € pour une personne physique et 750 000 € pour une personne morale en cas de réitération du manquement dans un délai de deux ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive.

Clause de renégociation (Sous-section 2)

L’article L.441-8 sur la renégociation dans les contrats d’une durée d’exécution supérieure à trois mois portant sur la vente des produits agricoles et alimentaires figurant sur une liste fixée par décret, reste inchangé.
LA FACTURATION ET LES DÉLAIS DE PAIEMENT  (Section 3)
Facturation (Sous-section 1)

L’ordonnance du 24 avril 2019 procède à une harmonisation et une clarification des règles de facturation par le biais du nouvel article L.441-9 du Code de commerce :
·         Pour la date d’émission de la facture, il est fait référence au Code général des impôts, selon lequel la facture est émise «dès la réalisation de la livraison ou de la prestation de services » (article 289 I. 3° du CGI). Selon l’article 256 II. 1° du même code, « est considéré comme livraison d’un bien, le transfert du pouvoir de disposer d’un bien corporel comme un propriétaire ».
·         Le Code précise l’intégralité des mentions obligatoires d’une facture et en ajoute deux : l’adresse de facturation de l’acheteur et du vendeur lorsqu’elle est différente de leur adresse ainsi que le numéro de bon de commande s’il a été préalablement établi par l’acheteur.
·         Transformation de la sanction pénale en sanction administrative: l’amende reste à 75 000 € pour les personnes physiques et passe à 375 000 € pour les personnes morales. Le montant maximum encouru est doublé en cas de réitération du manquement dans un délai de 2 ans à compter de la date à laquelle la première décision de sanction est devenue définitive. Elle est prononcée par la DGCCRF.

Délais de paiement (Sous-section 2)

Les dispositions sur les délais de paiement et intérêts de retard figurent désormais aux articles L.441‑10 à L.441-16, y compris la nouvelle procédure de rescrit en matière de délais de paiement créée par la loi du 10 août 2018 dite « Loi Essoc » (article L.441-15). La sanction reste inchangée.